Ce qui change (et va changer) dans la fonction publique en 2022
Réforme de la haute fonction publique, mesures salariales, élections professionnelles, protection sociale complémentaire… Passage en revue, en ce début d’année, des mesures qui impactent les agents publics ou les impacteront dans les prochains mois.
Ce début d’année ne se résume pas aux mesures de gestion de la crise sanitaire dans la fonction publique – notamment avec le retour du télétravail contraint. L’année 2022 est déjà et sera en effet marquée par plusieurs changements de taille pour les agents publics. Des changements à long terme également, mais dont la concrétisation pourrait aussi dépendre de la majorité qui sortira des urnes à l’issue des élections présidentielle et législatives.
L’entrée en vigueur de la réforme de la haute fonction publique.
Dans la lignée de l’ordonnance du 2 juin dernier, ce début d’année est marqué par l’entrée en vigueur de plusieurs mesures phares de la réforme de l’encadrement supérieur de l’État. À savoir la création de l’Institut national du service public (INSP) en remplacement de l’École nationale d’administration (ENA), avec des missions élargies, ou encore la création de la nouvelle “super-DRH” des cadres sup’ de l’État, la délégation interministérielle à l’encadrement supérieur de l’État (Diese). Le 1er janvier 2022 a également vu la création du nouveau corps des administrateurs de l’État, qui regroupera, à partir de 2023, l’ensemble des corps pourvus hier par l’ENA et aujourd’hui par l’INSP. Ce à l’exception, toutefois, des corps juridictionnels. Comme le prévoit un décret du 1er décembre, le corps des administrateurs civils et celui des conseillers économiques ont déjà intégré ce nouveau corps début 2022. Les autres grands corps de l’État seront mis en extinction, pour leur part, à compter du 1er janvier 2023. À savoir notamment le corps préfectoral, les corps d’inspection ou certains corps de diplomates. Un droit d’option leur sera toutefois ouvert jusqu’au 31 décembre 2023 pour qu’ils puissent décider d’intégrer le nouveau corps des administrateurs de l’État ou bien de rester dans leur corps d’origine. Fonctionnalisation oblige, l’année 2022 sera donc marquée par la poursuite des discussions sur la création des nouveaux statuts d’emplois de ces corps voués à l’extinction. Le voile s’est déjà levé sur le nouveau statut des préfets et sous-préfets, notamment. Ce début d’année sera aussi l’occasion pour les partenaires sociaux de discuter des rémunérations (actuelles et futures) des administrateurs de l’État. Si un décret a été publié mi-décembre pour fixer l’échelonnement indiciaire applicable aux membres de ce nouveau corps des administrateurs de l’État à compter du 1er janvier, une nouvelle grille est déjà prévue à compter du 1er janvier 2023, la date de la mise en extinction effective de l’ensemble des grands corps de l’État. Une convergence indemnitaire est également prévue cette année.
Mesures et discussions salariales.
Ce 1er janvier a été marqué par l’entrée en vigueur de plusieurs mesures salariales en faveur notamment des agents publics les moins bien payés, ceux de la catégorie C. Pour tenir compte de la nouvelle revalorisation du Smic, l’indice minimum de traitement a ainsi été relevé. L’organisation des carrières des catégorie C se voit également modifiée en ce début d’année, avec une réduction du nombre de certains échelons et de la durée de certains grades. Une bonification d’ancienneté d’un an a également été actée. Autant de mesures censées accélérer les déroulés de carrière. Au-delà, ce début d’année sera marqué par la poursuite de la Conférence sur les perspectives salariales dans la fonction publique, qui doit aboutir d’ici le mois de février à un “diagnostic des fragilités du système” et à “formuler des propositions ambitieuses d’évolution”, selon le gouvernement. À l’issue de cette conférence, la ministre de la Transformation et de la Fonction publiques, Amélie de Montchalin, souhaite même que soit engagée, courant 2022, une “négociation”sur les rémunérations et carrières dans la fonction publique. Une négociation salariale encore hypothétique, tout dépendant notamment des résultats qui sortiront des urnes au printemps. Lancée en juillet dernier par le gouvernement, cette conférence a toutefois un peu de plomb dans l’aile, puisque 4 syndicats (CGT, FO, FSU et Solidaires) ont décidé de la quitter, insatisfaits, notamment, comme les autres syndicats, de l’absence de perspective de revalorisation générale. Le point d’indice, pour rappel, est gelé depuis le début du quinquennat. Pour la ministre, malgré tout, cette conférence n’est “en rien caduque”.
Les élections professionnelles.
Elles se tiendront le 8 décembre prochain. Le scrutin s’annonce d’ores et déjà unique à plus d’un titre. Ces élections verront notamment la généralisation du vote électronique dans la fonction publique d’État. Après avoir été testée en 2014 et en 2018, cette modalité de vote y deviendra en effet la règle (sauf dérogations). Un véritable défi organisationnel. Le scrutin de décembre 2022 sera également marqué par la mise en place de la nouvelle cartographie des instances de dialogue social, pour lesquelles les agents publics seront amenés à élire leurs représentants. Exit en effet les comités techniques (CT) et les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT), fusionnés en comités sociaux en application de la loi de transformation de la fonction publique du 6 août 2019. Au-delà, le véritable enjeu de ces élections sera celui de la participation. Lors du précédent scrutin, en 2018, elle était passée pour la première fois sous la barre des 50 % (à 49,8 % précisément). Une baisse de participation qui interroge sur la représentativité au sein de la fonction publique. À noter aussi une incertitude de taille à ce propos : l’impact éventuel sur la participation de la révision de l’architecture des commissions administratives paritaires (CAP) et de la réduction des missions de celles-ci. L’action des représentants du personnel au sein de ces commissions était en effet, jusqu’à la réforme de 2019, l’une des principales motivations d’adhésion des agents publics aux organisations syndicales.
La mise en œuvre de la réforme de la protection sociale complémentaire.
Après l’ordonnance de février 2021 qui a notamment acté le principe d’une participation obligatoire des employeurs publics à la complémentaire santé de leurs agents, l’année 2022 sera en effet marquée par la poursuite des discussions sur les modalités de mise en œuvre de cette réforme de la protection sociale complémentaire dans la fonction publique. Et notamment dans le versant État. À ce propos, le gouvernement a présenté, ce jeudi 6 janvier aux syndicats, la version finale du projet d’accord interministériel dont les modalités d’application devront être discutées au niveau de chaque ministère. Ce projet d’accord définit notamment un “socle” interministériel minimal de garanties “destinées à couvrir les frais de santé par des contrats collectifs” et non plus individuels comme aujourd’hui. Des contrats à adhésion obligatoire. Les discussions vont également se poursuivre dans la territoriale, qui promettent d’être tendues. Prévu à l’ordre du jour du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT) du 15 décembre dernier, l’examen du projet de décret relatif à la participation des collectivités à la complémentaire santé de leurs agents a en effet été repoussé à une date ultérieure. Les syndicats avaient dénoncé des dispositions “indigentes” et demandaient l’ouverture de “véritables” négociations. Une réunion à ce sujet est prévue le 12 janvier avec les employeurs territoriaux.
Bastien SCORDIA pour acteurspublics.fr