Pourquoi Emmanuel Macron décongèle sa réforme des retraites
Le chef de l’État estime que le système par points favorise les plus précaires et assume qu’il va falloir travailler plus longtemps.
On a enfin le décryptage de ce que voulait dire Emmanuel Macron dans son adresse aux Français du 14 juin au cours de laquelle il avait expliqué qu’il faudrait « travailler davantage ». Le président de la République pensait non pas à la durée hebdomadaire de travail, mais à sa réforme des retraites. Le chantier du régime universel par points n’est donc pas enterré, loin de là. « Nous ne pouvons pas être un pays qui veut son indépendance, la reconquête sociale, économique et environnementale et être un des pays où on travaille le moins tout au long de la vie en Europe. Nous devons être honnêtes avec nous-mêmes », a expliqué le chef de l’État dans son entretien donné à la presse régionale.
Emmanuel Macron juge le régime à points plus juste que le système actuel. « Nous avons tous vu durant cette crise ce qu’on appelle “la deuxième ligne”, ces Françaises et ces Français engagés dans des petits emplois précaires. Les livreurs, les caissières… Cette France-là est perdante dans le système actuel », a-t-il justifié, avant de préciser qu’il va demander au nouveau gouvernement « de réengager rapidement une concertation en profondeur, dans un dialogue de responsabilité associant les partenaires sociaux dès l’été sur le volet des équilibres financiers ». Mais le président assure aussi qu’il est ouvert « à ce qu’elle soit transformée ».
Si ces propos sont loin d’être limpides, on comprend qu’il faudra bien prendre en compte l’impératif d’un retour à l’équilibre financier du système de retraites, mais que cela ne passera pas forcément par l’âge pivot, seuil en dessous duquel les Français subiraient une décote de 5 % par an sur leur pension pendant toute la durée de la retraite. Depuis la présentation de la réforme l’année dernière, le problème financier des retraites s’est même encore aggravé avec les pertes de recettes du régime lié à la crise économique. Le risque de braquer les syndicats est donc grand.
Un nouveau chemin plus « écologique » et « social »
Édouard Philippe peut-il se satisfaire du nouveau cadre fixé par le président, lui qui était très attaché à l’équilibre financier de la réforme des retraites et donc à l’âge pivot dans le nouveau système universel ? Cela reste à confirmer. Interrogé sur l’avenir de son Premier ministre, Emmanuel Macron s’est bien gardé de trancher pour l’instant. La nouvelle équipe devrait être annoncée avant le conseil des ministres de mercredi 8 juillet.
Plus généralement, le chef de l’État promet de « dessiner un nouveau chemin ». « Je le vois autour de la reconstruction économique, sociale, environnementale et culturelle du pays. Elle commence par le Ségur de la santé, elle se poursuivra par un chantier sur le grand âge, puis sur l’accompagnement de notre jeunesse, qui a le plus souffert de la crise. C’est à elle que nous avons demandé le plus de sacrifices. 700 000 ou 900 000 jeunes qui entreront sur le marché du travail à la rentrée. Ce sont ceux qui verront des guichets fermés. » Le gouvernement prépare des baisses de charges massives pour les entreprises qui embaucheront des jeunes. La facture pourrait atteindre 10 milliards d’euros par an. Mais la mesure est présentée comme la seule solution pour stimuler massivement les embauches et est présentée comme une mesure générationnelle.